Être ado et aidant : une double casquette lourde à porter

Être ado et aidant : une double casquette dure à porter 14% des lycéens sont aidants d’un de leur proche. Comment concilier ce rôle à grandes responsabilités avec l’insouciance d’une vie d’ado, entre cours, activités extra-scolaires et relations sociales ? Témoignages de jeunes aidants.

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Rédaction SoPress

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Plus de 14 % des lycéens français seraient de jeunes aidants(1). C’est-à-dire des jeunes ayant un proche malade, en situation de handicap ou d’addiction, auquel ils apportent une aide significative et régulière. « Cela ne veut pas forcément dire qu’ils sont tous en difficulté, précise Aurélie Untas, professeure de psychopathologie, mais cette situation peut avoir un impact sur la santé physique et mentale des jeunes, sur leurs activités sociales et leur scolarité. »

Une aide peu visible, mais pesante

Dans la plupart des cas, l’aide consiste moins à prodiguer des soins qu’à soulager son ou ses parents. C’est le cas de Mathilde, 17 ans, dont le petit frère est atteint de deux maladies génétiques rares ayant engendré de multiples complications. « Mes parents ont toujours tenu à ce que ma sœur et moi ne soyons pas impliquées dans les soins médicaux donnés à mon frère, raconte-t-elle. Mon rôle consistait à ne pas faire de vagues. Il fallait que je sois bonne à l’école, que je ne râle jamais, pour que mes parents puissent se concentrer sur les difficultés de mon frère. » Une situation qui a fini par devenir pesante pour la jeune fille, et que la période de confinement a accentuée, jusqu’à provoquer une dépression au moment d’entrer au lycée. « J’ai développé une phobie scolaire, car j’avais peur du regard des autres. Je craignais qu’on juge mon petit frère et j’avais l’impression qu’on me critiquait aussi. » Déscolarisée et placée en centre de soins pendant une partie de son année de seconde, elle a fini par surmonter ses troubles et par retourner en cours. « Je n’arrivais pas à me dire que j’étais malade, parce que mon petit frère était bien plus gravement atteint. Mais j’ai appris à admettre que j’avais le droit d’avoir des problèmes et qu’il ne fallait pas minimiser ceux que j’avais. »

Mon rôle consistait à ne pas faire de vagues, pour que mes parents puissent se concentrer sur les difficultés de mon frère.

Mathilde, 17 ans

Une plus grande maturité

Désormais en classe de première, Mathilde imagine se diriger vers des études de médecine. Une voie presque logique au regard de son passé. « J’ai besoin d’aider les autres. Et je pense avoir une capacité supérieure à les comprendre. Il n’y a pas beaucoup d’avantages à se retrouver dans la peau d’un jeune aidant, mais on grandit en tout cas plus vite que les autres. » Une orientation professionnelle assez courante dans ce genre de cas, selon Aurélie Untas qui a cosigné l’étude Adocare : « Quand on a été un jeune aidant, il y a plus de chance qu’on aille vers des carrières autour du soin ou du social. L’expérience a souvent une influence dans les choix de carrière. »

Ce n’est pas Quentin, 16 ans, qui contredira cette observation. Son petit frère est en fauteuil roulant, souffrant d’une maladie musculaire. « Je suis protecteur, parce qu’il lui est forcément difficile de se défendre lui-même, explique Quentin. J’ai envie de faire des études de droit ou même l’armée, de faire en tout cas quelque chose qui soit en rapport avec la défense des autres. » S’il rêve qu’un jour un remède à la maladie de son frère soit découvert, afin de pouvoir « se chamailler avec lui, comme on se chamaille avec un frère », il essaie de voir le côté positif de la situation. « Il faut voir ça comme une épreuve, pas une fatalité. Quelque chose à surmonter. Et on sera tous plus heureux si on s’aide. »

Quelles aides pour les jeunes aidants ?

Aujourd’hui, seules deux associations aident les jeunes aidants en France : JADE (Jeunes aidants ensemble) et La Pause Brindille. La première, qui existe depuis 2016, organise notamment des ateliers artistiques et des séjours de répit gratuits, afin de sortir les jeunes de leur quotidien. La seconde, créée en 2019, grâce à laquelle ont été recueillis les témoignages de Mathilde et Quentin, se concentre principalement sur le partage de témoignages et l’échange, proposant un service d’écoute accessible par appel téléphonique, SMS ou chat. Des actions qui comptent, car comme le souligne Mathilde, la première aide dont ont besoin les jeunes aidants est le plus souvent de pouvoir se confier et souffler. « Mon conseil est de trouver quelqu’un à qui parler de votre quotidien, et qui de préférence ne fait pas partie de la famille ou n’est pas proche, parce que chacun a besoin d’un regard extérieur, de quelqu’un à qui l’on peut dire tout ce qu’on veut, pour vider son sac de temps en temps. Ça fait du bien et ça apaise. »

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Depuis plus de 15 ans, la Macif s’engage en faveur des aidants qui accompagnent un proche fragilisé par le handicap, la maladie ou la dépendance.

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