Vapoter peut-il aider à arrêter de fumer ?

La France compte 16 millions de fumeurs. Chaque année, ce sont entre 400 000 et 500 000 personnes qui arrêtent de fumer (1). D’après de récentes études, le vapotage pourrait être un substitut efficace pour stopper la cigarette. Le point avec la présidente de la société francophone de tabacologie.

Temps de lecture : 6 min

à propos du contributeur

Dr Anne-Laurence Le Faou
Dr Anne-Laurence Le Faou

Présidente de la société francophone de tabacologie

1 Un nombre de fumeurs en baisse

Santé Publique France a mis en évidence une baisse de la consommation de tabac en France. En 2017, 26,9 % des adultes étaient fumeurs contre 29,4 % en 2016 (2). Il est probable que la perspective d’un paquet de cigarettes à 10 euros d’ici 2020 confirme cette diminution.

La cigarette électronique est quant à elle utilisée par 3,3 % des Français âgés de 15 à 75 ans, dont 2,5 % l’utilisent quotidiennement (3).

3e édition du #MoisSansTabac

En novembre 2018, 242 000 personnes se sont inscrites pour l'opération #MoisSansTabac contre 158 000 en 2017. D'après Tabac info service, les appels traités par les tabacologues ont augmenté de presque 20 % et les visites du site Internet de plus de 30 % entre 2017 et 2018 (4).

2 La cigarette électronique : une alliée pour arrêter de fumer ?

Selon une étude publiée dans la revue scientifique New England Journal of Medicine, (5), la cigarette électronique serait plus efficace que le patch à la nicotine pour arrêter de fumer. Un an après le début de l’étude, le taux de sujets ayant arrêté le tabac était de 18 % dans le groupe « vape » (e-cigarette), contre presque moitié moins (9,9 %) dans le groupe des « substituts nicotiniques » (patchs et gommes).

Mais ces bons résultats peuvent aussi amener à s’interroger sur le vapotage. Délaisser la cigarette pour ce substitut n’est-il pas comme remplacer une addiction par une autre ? Car, en effet, un an après l'étude, parmi les sujets qui avaient arrêté le tabac, « 80 % utilisaient encore l’e-cigarette, contre 9 % qui utilisaient encore les substituts nicotiniques. » (5)

Anne-Laurence Le Faou, présidente de la société francophone de tabacologie, a conscience de l’effort que peut représenter le sevrage du tabac et admet que certains anciens fumeurs, par crainte de rechuter, « garderont la cigarette électronique ou un substitut nicotinique à vie pour ne plus fumer. »

Les hôpitaux français étudient l’efficacité de l’e-cigarette dans le sevrage du tabac

Lancée dans 11 hôpitaux par l’AP-HP, l'étude Ecsmoke (6) s'adresse aux personnes âgées de 18 à 70 ans fumant au moins 10 cigarettes par jour et souhaitant arrêter de fumer. Elle vise à comparer l'efficacité de la cigarette électronique dans le sevrage du tabac par rapport à un traitement de référence. Ce ne sont pas moins de 650 personnes qui participent à cette étude.

3 Que sait-on des effets du vapotage ?

Si les études ont démontré qu'une cigarette « classique » contient 4 000 composés chimiques responsables de la toxicité du tabac sur l’organisme (7), le Dr Le Faou émet également des réserves sur les effets de la cigarette électronique, encore trop peu connus.

« Un médicament mis sur le marché a subi des études cliniques. Mais la cigarette électronique n'est pas un médicament : c’est un produit de consommation courante. Ses effets indésirables ne sont donc pas enregistrés. Si la vapoteuse est moins dangereuse qu'une cigarette, il s’agit toujours d’un choix en termes de bénéfices-risques. Bien que de très nombreux liquides présents dans les cigarettes électroniques soient analysés par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ndlr), nous ne pouvons pas affirmer de façon absolue qu'il n'y a pas d'effets indésirables sur l’organisme à moyen et long terme. »

Un flou d’autant plus grand qu’il existe diverses formes de cigarettes électroniques (avec ou sans nicotine), chacune manifestant des effets différents sur la santé.

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C'est le nombre de boutiques spécialisées en vente de cigarettes électroniques fin 2017 en France, soit environ 5 % de plus qu’en 2016 (2).

4 Faut-il rembourser la cigarette électronique ?

Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), le passage au remboursement à 65 % des traitements obtenus sur prescription, c’est-à-dire les patchs et les gommes à mâcher, continue à avoir un fort impact sur le choix d'arrêter de fumer (8). Au Royaume-Uni, l’e-cigarette est aussi remboursée. Une mesure qui, d’après Anne-Laure Le Faou, n’est pas encore envisageable en France :

« Les Anglais n'ont pas la même façon de financer leur santé qu'en France, et avec seulement 17 % de fumeurs, ils veulent utiliser tous les moyens pour encore baisser ce chiffre. En France, nous venons juste de rembourser les traitements médicamenteux et nous avons encore beaucoup de formations à diffuser auprès des professionnels de santé, qui connaissent les complications liées au tabac mais pas forcément comment aider les personnes à arrêter de fumer. Rembourser la cigarette électronique, cela suppose que ce soit un médicament et ce n'est pas le cas, ce n'est donc pas le champ de l'assurance maladie. Il faut des études nationales comme celle lancée par l'AP-HP avant d’envisager un éventuel remboursement. »

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L'Essentiel de l'article
  • En 2018, Santé Publique France note une baisse de la consommation de tabac en France.
  • La cigarette électronique est utilisée par 3,3 % des Français âgés de 15 à 75 ans (3).
  • La cigarette électronique serait plus efficace que le patch nicotinique pour arrêter de fumer.
  • Mais les effets du vapotage sont encore trop peu connus.
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