Les coachs en parentalités, les nouveaux conseillers de la vie de famille ?

Rythme de vie épuisant, comportements ingérables des enfants, conflits familiaux, fatigue et stress quotidien… De plus en plus de parents dépassés, isolés et soumis aux injonctions pour « être un bon parent » se tournent vers des coaches en parentalité. Et nombreux sont ceux qui y trouvent une aide précieuse pour retrouver un équilibre familial. Reste que ce marché en plein essor n’est pour le moment contraint à aucune réglementation.

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Rédaction So Press

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« Réenchantez votre vie de famille : des solutions pratiques à vos difficultés parentales. » Voilà un message on ne peut plus clair qu’on peut lire sur le site internet d’Elena Goutard. Diplômée de deux Bac+5 en éducation, pédagogie et psychologie de l’enfant, cette mère de quatre enfants a lancé son entreprise de coaching parental il y a une dizaine d’années, quand encore peu de familles connaissaient l’existence de ce concept né dans les années 1980 aux États-Unis. Aujourd’hui, ce nouveau marché est un véritable succès pour nombre de parents perdus, isolés et assommés d’injonctions et de pressions médiatiques sur « comment être un bon parent ». « Cet accompagnement s’adresse aux parents épuisés par leur quotidien, le stress et les relations conflictuelles avec ou entre leurs enfants, aux parents séparés en recherche de clés pour mieux entourer leurs enfants mais aussi aux futurs parents souhaitant adopter de bons réflexes éducatifs dès la naissance », note Elena Goutard. La coach parentale voit d’ailleurs arriver dans son cabinet de plus en plus de parents qui élèvent des enfants aux profils atypiques (TDAH, hypersensibilité, syndrome d’Asperger, etc.).

Accompagner les parents en détresse

Basé sur la psychologie de l’enfant et sur les neurosciences, l’accompagnement en parentalité apporte aux parents qui se retrouvent au bout du tunnel des outils simples, concrets et ciblés pour faciliter leur quotidien et rétablir un équilibre familial. « Dans un premier temps, notre rôle est d’écouter sans jugements les parents confier leurs inquiétudes cumulées. À partir de là, on cerne des problématiques. Par exemple, le manque de règle, un traumatisme chez les parents, des colères ingérables et impulsives chez les enfants. Pour ce dernier cas, on apprend aux parents à réguler leurs émotions via des exercices de respiration, à identifier ce qui déclenche les crises de colère de l’enfant et à mettre en place des outils ludiques pour que l’enfant travaille sa colère avec le parent », explique Elena Goutard.

La coach parentale avoue ne pas donner de « solution miracle ». « Toutes les dynamiques familiales en place depuis des années ne peuvent être changées en une séance. Le retour à un équilibre familial dépend beaucoup du travail des parents sur le long terme », souligne-t-elle. En dix ans, Elena Goutard a déjà aidé des centaines de parents, prêts à débourser 80 euros pour une séance voire des forfaits pour des familles qui cumulent plusieurs problématiques.

Routine de règles et « coin de retour au calme »

Louise* et son conjoint ont fait appel à une « guide parentale » quand le comportement de leur fille de 5 ans, Jeanne*, a pris des « proportions ingérables » dans leur foyer en Belgique. « Elle répondait systématiquement “non” à tout ce qu’on lui demandait. Parfois, elle faisait exprès de faire ce qu’on lui interdisait. Elle pouvait aussi être violente. Au début, on essayait de trouver des stratégies sans s’énerver, mais rien ne fonctionnait. On finissait par s’énerver, par crier et par la contraindre. C’est devenu épuisant et invivable au quotidien. On était complètement désemparés. Je n’avais même plus envie de me lever le matin pour m’occuper d’elle », lâche sa mère.

Une fois, Jeanne lui a mis une claque. Louise est entrée dans une colère noire avant de culpabiliser et de s’effondrer. La goutte de trop. Deux semaines plus tard, le couple a entamé un programme PEHP (Programme d’entraînement aux habiletés parentales) en dix séances, auprès d’une guide parentale « compétente en neurosciences », précise Louise, confiante. Ensemble, ils ont mis les mots sur deux problématiques : « troubles d’opposition et de provocation ». Les parents ont ensuite réadapté leurs comportements aux colères de leur fille et mis en place des outils concrets comme une routine de cinq règles dans la maison que tout le monde doit respecter ou un « coin de retour au calme » équipé d’objets sensoriels, de doudous et de livres sur les émotions où Jeanne est libre d’aller lors d’une crise. « Avoir des consignes communes à suivre nous a soulagés. Avec mon conjoint, on est devenus cohérents sur notre modèle éducatif. On se sent plus en confiance dans nos actes, on ne crie plus et on a beaucoup moins de fatigue émotionnelle », confirme Louise qui ne regrette pas d’avoir payé 700 euros pour suivre le programme.

Caractère scientifique des conseils

Reste qu’un coach en parentalité n’est soumis à aucune réglementation, et en tant que tel, il n’est pas remboursé. Cela dépend du statut de la personne. Certaines consultations chez les psychologues qui offrent des services de coaching peuvent être en partie prises en charge. Si certains coaches suivent des études en psychologie de l’enfance, d’autres s’autoproclament « experts » en relations parents-enfants.

Une possible arnaque ? Héloïse Junier, psychologue de l’enfance, docteure en psychologie et autrice de la BD de parentalité Ma vie d’enfant (Dunod Graphic, 2023), met en garde : « Pour un coach en parentalité, avoir un diplôme universitaire n’est pas toujours gage de légitimité et de sérieux. Cependant, c’est plus une question de sensibilité et de culture personnelle. Comment les parents peuvent-ils faire du tri parmi toutes ces personnes qui proposent une pluralité de conseils pour l’enfant ? Certains sont clairement perdus. Il faut avant tout s’intéresser au caractère scientifique des conseils en matière d’éducation. C’est une garantie de connaissances collégiales issues de l’intelligence collective rigoureuse et donc un garde-fou énorme. Certains spécialistes disent en effet s’appuyer sur des données scientifiques alors que ce n’est pas toujours le cas. Dans un premier temps, il faut voir si le/la spécialiste appuie son argumentaire sur des sources ou si ses propos ne se basent que sur son intuition. S’il se base sur des sources, il faut ensuite s’interroger sur la nature de ces sources (quelle étude ? quel auteur, ancien ou actuel, scientifique ou non ? quelle université ?). » Avant de poursuivre : « Il faut aussi que les parents suivent ce qui est en phase avec leurs valeurs humaines et avec ce qu’ils veulent donner à leurs enfants. »

*Les prénoms ont été modifiés

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