Les enfants font-ils vraiment des caprices ?

Des cris pour un bonbon, des pleurs pour un dessin animé ou une grosse colère a priori sans raison… Pour les parents, il n’est pas toujours facile de faire face aux moments d’extériorisation des plus jeunes. Mais s’agit-il vraiment de caprices, et comment faire pour gérer ces instants de vie compliqués ? Réponses scientifiques et témoignages de parents.

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Rédaction SoPress

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En cette fin de journée qui s’est révélée longue entre le travail ou les transports, Laura n’a pas de temps à perdre et pas franchement envie de s’attarder dans le magasin où elle fait les courses. Mais voilà qu’au beau milieu des rayons, son fils de 5 ans refuse soudainement d’avancer et pique une crise en s’allongeant par terre. « Entre la pression d’avoir un autre impératif à gérer dans dix minutes, celle des gens autour qui te jugent en se disant que je ne sais pas gérer mon enfant ou que je ne l’élève pas bien… Forcément, ce n’est pas facile, admet cette mère de 38 ans, qui a deux garçons. Je sais bien que c’est un tourbillon d’émotions plus qu’un caprice, mais j’ai du mal à mettre des mots sur ce genre de comportement, d’autant qu’ils ne sont pas si rares. Lorsque cela arrive, on s’énerve et on culpabilise en même temps, d’autant plus quand on ressent une petite envie de les “massacrer” ! »

Une réflexion que tout parent, ou presque, s’est déjà faite : face aux attitudes excessives de son enfant, comment réagir ? Faut-il lâcher ou au contraire se fâcher ? Est-ce que les enfants manipulent leurs parents ?

Hiérarchiser les besoins, impossible pour un enfant

« Ils te poussent, ils te poussent, ils te poussent… et j’ai l’impression que c’est une manière de tester notre patience de parents, reprend Laura, qui travaille dans la communication. Personnellement, lorsque mes fistons se mettent en rogne, il m’arrive souvent de les ignorer et de faire comme s’ils n’existaient pas. Quand ils sont calmés, on en discute à tête reposée. Le vrai risque, je pense, c’est de s’énerver et de répliquer d’une manière disproportionnée que nous n’oserions jamais afficher avec un adulte. »

Sa sœur Maryon, psychiatre qui vient d’accoucher d’un petit Anatole après avoir eu une fille il y a quatre ans, a une perception différente de l’éducation : « Je crois que nos enfants essayent de nous manipuler et font tout pour arriver à leurs fins. Ce qui semble d’ailleurs naturel, puisqu’entre adultes nous le faisons aussi parfois. Par exemple, ma fille me fait des scènes pour regarder un dessin animé. Elle dit que ça lui fera du bien, elle pleure, elle se victimise… Ou bien elle devient sage et parfaite, pour ensuite nous dire qu’elle a mérité de se poser devant La Reine des Neiges. Mais en ce qui concerne le terme “caprice”, j’estime qu’il y a un malentendu entre les adultes et les enfants : regarder Pat’Patrouille constitue un besoin imminent pour l’enfant, car c’est une source de plaisir alors que ce n’est pas nécessaire aux yeux de l’adulte, qui n’arrive pas forcément à comprendre que son enfant ne peut pas hiérarchiser ses besoins. » Quand elle ne cède pas à sa demande, elle voit souvent sa fille fondre en larmes… mais ne change pas d’avis, ou pas souvent. C’est ensuite, lorsque le calme est revenu, qu’elle s’explique elle aussi avec ses enfants.

L’enfant n’a pas conscience que son besoin n’est pas forcément vital.

Morgane Cadu, pédopsychiatre

Peut-on réellement parler de caprice ?

La pédopsychiatre Morgane Cadu, installée à Toulouse, donne sa position sur le sujet : « Pour un nourrisson, et jusqu’à l’âge de 4 ou 5 ans environ, le moyen d’expression réside globalement dans les pleurs. Dès lors, un bébé va pleurer pour tout et n’importe quoi : quand il a faim, quand il a soif, quand il a un peu chaud… Avant son sixième anniversaire, on considère que l’enfant n’est pas capable de faire la part des choses entre ses besoins et il va les exprimer d’une façon parfois si intense qu’elle peut paraître excessive pour un adulte. Il a très mal, il va hurler. Il veut un bonbon, il va hurler autant. Autrement dit, le cerveau d’un enfant ne peut pas différencier les degrés d’émotion comme sait le faire un adulte. Ainsi, le terme caprice – qui a une connotation péjorative, généralement – n’est pas forcément adapté, puisque l’enfant n’a pas conscience que son besoin n’est pas forcément vital. Au fur et à mesure de l’apprentissage, ses demandes vont s’adapter de plus en plus. »

Mais est-ce à dire qu’un enfant n’est en réalité pas capable d’élaborer des stratégies qui lui permettent de faire craquer ses parents dans sa quête d’un chocolat ou d’un jeu vidéo ? « Quand l’enfant grandit, et atteint notamment l’âge charnière où il teste inévitablement les limites qu’il ne connaît pas encore, il peut effectivement tendre à devenir “capricieux” lorsqu’il comprend, par exemple, que des hurlements suffisent pour atteindre un objectif », répond la spécialiste.

Le cadre, secret anti-caprice

« C’est là que rentre en compte le cadre posé par les parents et les proches qui s’occupent quotidiennement des enfants, poursuit Morgane Cadu. Le cadre sert à transmettre ou acquérir les codes sociaux. » Ce cadre parental ou éducationnel, justement, rassure l’enfant qui a besoin de connaître les limites auxquels il sera confronté toute sa vie. Il en aura besoin pour réussir à s’intégrer dans la société, mais aussi pour fonctionner avec les autres et comprendre la hiérarchie dans le monde professionnel. « Face au caprice, tout repose sur ce cadre, ajoute la pédopsychiatre. C’est lui qui déterminera, en partie bien sûr, comment le futur adulte saura gérer ses émotions… » Et s’il est plus doué qu’un enfant à ce niveau-là !

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L'Essentiel de l'article
  • Avant 4-5 ans, un enfant exprime ses émotions par les pleurs
  • L'enfant ne peut pas comprendre que son besoin n'est pas vital
  • Mettre un cadre apprend à l'enfant à gérer ses émotions
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