L’importance du sourire dans les interactions sociales

Pilier de la communication non verbale, le sourire a de nombreuses vertus : il permettrait d’entrer plus facilement en relation avec les autres, d’aller au-delà des mots ou même de soulager les maux du corps. Qu’est-ce qui se cache derrière ce geste apparemment anodin ?

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Un outil de communication

Le sourire aiderait à engager la conversation avec quelqu’un, à désamorcer des conflits ou à donner une meilleure image de soi en société. « On sourit rarement tout seul, souligne David Le Breton, chercheur spécialisé dans l’anthropologie du corps. Si on le fait, c’est généralement qu’on pense à quelqu’un ou à quelque chose d’autre. » Une invitation à l’échange, un moyen de communiquer, même quand on n’a pas les mots. Marie I., psychologue en PMI et en Établissement d’accueil de la petite enfance (EAPE), se définit comme quelqu’un de très souriant. Il faut dire que pour elle, le sourire est quasiment un outil de travail : il l’aide à entrer en relation avec les tout-petits, mais aussi à détecter d’éventuels problèmes. « Je suis toujours rassurée quand je vois un bébé me donner un sourire en réponse, raconte-t-elle. Je surveille ce sourire : c’est un signe de bon développement psychologique. »

Un remède bon pour le corps et pour la tête

L’acte de sourire, qui nécessite d’activer dix-sept muscles en même temps, aurait de nombreux bienfaits sur la santé : réduction du cortisol (« l’hormone du stress »), régulation de la tension artérielle ou encore, réoxygénation des cellules. Surtout, il libère de l’endorphine, également surnommée « l’hormone du bonheur ». Au point que certains professionnels de santé vantent les mérites de la « thérapie par le sourire », dont le principe est très simple : se sourire à soi-même quotidiennement devant le miroir.

Toutefois, David Le Breton, auteur de l’ouvrage « Sourire : anthropologie de l’énigmatique », préfère nuancer le caractère absolument positif de ce geste : « Il peut avoir des tonalités très différentes : il y a des sourires de mépris, de supériorité, d’accueil ou de bienvenue. Il ne faut pas le prendre comme un singulier, mais comme un terme à toujours voir au pluriel. Ce qui détermine sa signification, c’est le contexte dans lequel il apparaît », resitue l’anthropologue.

Une question d’imitation

Le sourire s’apprend par mimétisme dès la naissance. « Les bébés sont programmés pour décrypter les visages humains et y répondre », résume Marie I. C’est notamment grâce aux neurones miroirs, essentiels dans la compréhension des intentions et des émotions d’autrui que le sourire devient contagieux. À l’inverse, difficile d’établir des relations sociales lorsque ces zones du cerveau fonctionnent mal. Pour exemple, un enfant atteint d’un trouble du spectre autistique aura peut-être du mal à reconnaître les expressions faciales, et donc, à entrer en relation avec les autres. « Un cercle vicieux, poursuit Marie I. On constate aussi un désintérêt de certains parents face à un enfant qui n’est pas dans l’interaction. »

Une expérience datant des années 1970, intitulée « The still face experiment » (« l’expérience du visage impassible » en français), montre que lorsqu’une mère, face à son enfant, se fige et présente un visage inexpressif pendant deux minutes, le bébé montre des signes d’inquiétude et cesse également d’interagir. Avant de pleurer à chaudes larmes. « Heureusement, on ne mène plus ce genre d’expériences, rassure Marie I. Mais on voit bien la détresse affective provoquée. Cela marche dans les deux sens : le sourire est aussi la récompense du parent qui s’occupe de l’enfant. »

On ne sourit pas qu’avec la bouche

Pendant la crise sanitaire, la psychologue a eu la bonne surprise de constater que les tout-petits parvenaient encore à distinguer son sourire, même masqué. « Je pense qu’ils ont su repérer d’autres signes qui montrent que l’adulte est en relation positive avec eux », analyse-t-elle. La bouche, les yeux, la voix ou la posture, le sourire mettent en jeu le corps tout entier. « De manière moins forte que le rire », précise David Le Breton, qui a également publié une Anthropologie du rieur. Pour lui comme pour la psychologue, le rire serait une sorte de prolongement du sourire, avec un pouvoir supérieur. En y repensant, Marie I. ne peut s’empêcher de rigoler : « Le rire d’un bébé a quelque chose de délicieux. Il est tellement communicatif qu’il peut contaminer tous les adultes, même les plus ronchons. C’est l’arme ultime. »

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