« Jamais je n’ai été aussi en forme que depuis que je suis végétarien ! » Après une heure de foot en salle, Jérémy rayonne. Masseur-kinésithérapeute et sportif convaincu, ce père de 39 ans ne mange ni viande ni poisson depuis près de cinq ans. Comme sa femme, comme ses enfants, comme ses frères et sœurs, et 1,4 millions de Français(1). Ce sont surtout des préoccupations écologiques qui l’ont amené à faire ce choix. Et il ne le regrette pas, puisqu’il se sent parfaitement bien dans son corps : « Je n’ai jamais eu de quelconque problème de santé. Pas de fatigue, pas de déprime… »
Régime végétarien : des risques peuvent exister
Stanislas Kran, qui se définit comme un ancien « très mauvais végétarien », l’a observé et a d’ailleurs raconté son aventure dans un livre L’Expérience alimentaire (éditions Grasset) : « C’est en 2013 que, du jour au lendemain, j’ai foncé dans ce régime tête baissée, car je lisais partout que c’est très facile de devenir végétarien. En réalité, ça n’a pas été si simple. D’autant que, par souci de cohérence, je suis rapidement devenu quasiment végétalien (aucune consommation de produits d’origine animale, ce qui exclut le lait et les œufs ou encore le miel, ndr). Les effets sur mon corps ont été un affaiblissement généralisé, un amaigrissement, une perte de masse musculaire… Le tout associé à de la fragilité psychique et des symptômes dépressifs que j’ai fini par attribuer à une carence en tryptophane, un acide aminé précurseur de la sérotonine. »
Ce documentariste pour la télévision s’est décidé au bout de deux ans à faire une prise de sang qui a dévoilé une carence en vitamine B12, l’obligeant à faire machine arrière.
Le végétarisme n'est pas fait pour tout le monde
Son témoignage n’étonne pas les experts de la nutrition, lesquels expliquent facilement ces troubles physiques. « Pour la majorité des enfants et des adultes, le régime végétarien ne répond pas correctement aux besoins nutritionnels. Les produits carnés sont en effet indispensables pour les apports en fer, de même que les produits de la mer le sont pour ceux en DHA (acide docosahexaénoïque), un acide gras essentiel pour le fonctionnement et le développement du cerveau, explique Patrick Tounian, chef du service de nutrition et gastro-entérologie pédiatriques de l’hôpital Trousseau (Paris). Les végétaux riches en fer, comme les épinards ou les légumineuses, ne peuvent pas remplacer les produits carnés, car le fer qu’ils contiennent est huit fois moins bien absorbé par l’intestin. »
Même son de cloche chez le Docteur Jean-Michel Lecerf, médecin nutritionniste et chef du service nutrition de l’Institut Pasteur de Lille ayant rédigé un ouvrage sur la question intitulé La viande : Un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout (Editions Buchet-Chastel) qui apporte certaines précisions : « Il faut distinguer le régime végétarien et le régime végétalien, ce dernier étant plus problématique en raison du manque de calcium, surtout concernant les personnes âgées, et les enfants en croissance. Pour le régime végétarien, les études montrent globalement des déficits de certains nutriments : il y a un peu moins de fer, de calcium et d’iode ou encore de zinc dans le sang des végétariens que dans celui des omnivores. Sans poisson, il y a aussi un déficit d’oméga-3. Ce n’est pas dramatique même si le cerveau et la vision peuvent être impactés, mais ça peut être dangereux pour les enfants, les femmes allaitantes et les femmes enceintes. »
En moyenne, on remarque également plus de cas d’ostéoporose et de fracture chez ceux qui ne mangent pas de viande ou de poisson.
Savoir pallier aux carences
« La vitamine B12 est cruciale pour le système sanguin ou nerveux et elle n’est pas apportée par les végétaux. Si bien qu’au bout de trois à cinq ans, si aucun supplément n’est apporté, des troubles apparaissent : paralysie, dépression, anémie… On l’observe souvent, explique Patrick Tounian. Pour la vitamine B12 et le fer, les prises de compléments sont indispensables, sauf peut-être pour les rares individus qui possèdent un variant génétique leur permettant d’absorber anormalement le fer végétal et peuvent ne pas être carencés malgré l’absence de consommation de produits carnés. Pour le DHA, des compléments sont aussi nécessaires. »
C’est pourquoi Alice, kiné elle aussi, absorbe quotidiennement des compléments alimentaires, à l’instar de son confrère Jérémie. « Mais j’en prenais déjà avant de devenir végétarien, parce que je manquais de fer, détaille la trentenaire, qui indique que ses analyses médicales sont très bonnes. Je n’ai pas de cholestérol, pas de carence ou autre mauvais signal. Je dirais même que je me sens en meilleure santé depuis que je suis végétarienne : on a moins de ballonnements, de problèmes digestifs quand on retire la viande de son alimentation. Je ressens du confort, de l’énergie à force de végétaliser mon assiette. » Ses conseils, pour ceux qui seraient intéressés ? « Ne pas simplement supprimer la viande ou le poisson ! » De son côté, Jérémie recommande « d’y aller doucement, en se renseignant ».
Il faut transformer son alimentation, découvrir des recettes et réapprendre à composer un repas. C’est une nouvelle façon de s’alimenter .
Alice, kiné et végétarienne
« Nous, les scientifiques, préconisons de manger plusieurs fois végétariens dans la semaine plutôt que d’adopter un régime végétarien strict, conclut le Dr Lecerf, membre de la Société française de nutrition. Davantage de fibres, de fruits, de légumes… Le régime végétarien apporte des avantages par rapport à une mauvaise alimentation occidentale, on ne peut pas le nier. Mais il faut trouver le bon équilibre, en considérant notamment le système osseux et nerveux. Statistiquement, les végétariens font par exemple plus d’AVC, mais présentent moins de diabète et de pathologie cardio-vasculaire. Quant aux cancers, on ne sait pas, ce n’est pas très clair. »
À chacun son équilibre en se faisant accompagner !
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