Comment protéger son conjoint en cas de décès ?

Pour éviter de nombreuses difficultés au conjoint restant en cas de décès, il est important d’anticiper chaque situation. Les conseils de Nathalie Couzigou-Suhas, notaire, pour le protéger au mieux.

Temps de lecture : 7 min

à propos du contributeur

Nathalie Couzigou-Suhas

Notaire

Paris

1 Pensez à l’assurance décès ou à l’assurance-vie

Suite à la disparition de son conjoint, le partenaire survivant est souvent confronté à de nombreuses dépenses inattendues. La libération rapide d’un capital est une bonne solution pour l’aider à subvenir à ses besoins ou à ceux de la famille après cette lourde épreuve. Dans cet objectif, deux solutions complémentaires se présentent à vous : la prévoyance (assurance décès) et l’épargne (assurance-vie).

  • Première solution : l’assurance décès. Celle-ci n’est pas un placement financier : elle ne couvre que le décès, ainsi que les obsèques (selon le contrat souscrit), et vous engage à verser une cotisation unique ou périodique. En cas de décès en cours de contrat, le ou les bénéficiaires perçoivent un capital fixe, déterminé à la souscription du contrat. Mais si le risque ne survient pas, vous ne pouvez pas récupérer les sommes versées À noter que généralement, ce contrat ne couvre l’assuré en cas de décès que durant sa période d’activité.
     
  • Deuxième option : l’assurance-vie. Celle-ci vous engage à verser une prime unique ou à l’alimenter au fil des ans par des versements libres. À votre décès, l’assureur versera un capital correspondant aux primes versées, revalorisées à un taux défini contractuellement.

À savoir

Depuis 2007, le conjoint survivant et le partenaire de Pacs sont exonérés de droits de succession pour tous les biens recueillis après le décès. Ceux-ci n’auront donc rien à régler au fisc.

2 Un testament pour protéger son conjoint

« Quand on est marié, quel que soit le régime du mariage, si rien n’a été prévu, le conjoint survivant se retrouvera face à un choix : profiter des biens en usufruit durant toute la durée de la succession sans avoir de compte à rendre aux autres enfants ou prendre 25 % de la succession en pleine propriété et laisser le reste aux enfants. Si le défunt avait des enfants d’une précédente union, il n’y a plus d’option, le conjoint survivant a droit à 25 % de la succession en pleine propriété. Le conjoint se retrouve alors en indivision avec les enfants. Et tous les biens du défunt (y compris les biens hérités d’aïeux du défunt) sont concernés. Des enfants d’une première union peuvent alors se voir contraints à partager avec leur belle-mère la maison de leur grand-père… Si le conjoint survivant souhaite rester dans la résidence principale, il peut y rester à vie, mais son occupation sera calculée et viendra en déduction du quart de sa pleine propriété. Autant de situations qui peuvent être très inconfortables surtout quand il s’agit d’une famille recomposée avec des enfants d’une précédente union », souligne Nathalie Couzigou-Suhas.

D’où l’utilité d’un testament sur mesure !

Si les partenaires ne sont que pacsés, le conjoint n’est absolument pas protégé. Sans testament, au décès de son conjoint, il aura juste le droit de résider un an dans le logement.

3 Deux formules pour protéger le conjoint et éviter des heurts familiaux

Testament pour protéger son conjoint : faire une donation au dernier vivant

Cette donation (dit aussi « donation entre époux ») porte sur tous les biens que l'époux donateur possédera au jour de son décès. Les enfants ne sont pas déshérités mais les biens sont « gelés » jusqu’au décès du conjoint survivant. En revanche, si le conjoint souhaite vendre un bien, cela doit se faire avec l’accord des enfants qui récupéreront leur part au moment de la vente.

« Cet acte doit être effectué chez un notaire et coûte entre 400 et 500 € », ajoute Nathalie Couzigou-Suhas.

Les enfants ne recueillant rien au décès de leur père ou mère, cela peut aboutir, spécialement au sein de familles recomposées, à un sentiment d’abandon et de mise à l’écart des enfants. Il faut avoir à l’esprit que la succession et la transmission ne sont pas que question d’argent et, qu’à cette occasion, c’est souvent le lien de filiation et le sentiment d’appartenance à une famille qui entrent en scène.

Si la famille est recomposée, la notaire encourage vivement le signataire à rédiger une lettre pour accompagner l’acte afin d’amortir le choc psychologique des enfants de la première union.

Modifier son contrat de mariage

Il est possible d’opter pour un régime de communauté plus ou moins élargie, le maximum étant la communauté universelle (qui suppose un contrat de mariage notarié), assortie d’une clause d’attribution intégrale au conjoint survivant. Tout est, dès lors, susceptible de revenir au nouveau conjoint… Cela comprend les biens meubles ou immeubles présents et à venir, acquis par donation ou succession avant, pendant ou après le mariage. Cette clause peut aussi ne concerner qu’un bien, comme la résidence principale.

« Ce régime de communauté universelle est le plus souvent assorti d’une clause d’attribution de l’intégralité de la communauté au conjoint survivant. Ainsi, lors du premier décès, le conjoint devient le seul propriétaire de la totalité des biens du couple. Et les enfants ne recevront leur part qu’au décès du second, si celui-ci n’a pas jugé bon de les vendre ou y a été contraint pour assurer sa subsistance… Ce régime est souvent utilisé pour des couples sans enfants d’un certain âge ou ayant des enfants communs. Attention, dans ce dernier cas, les enfants sont pénalisés fiscalement car ils paieront des droits de succession beaucoup plus élevés que si le défunt s’était contenté de signer une donation au dernier vivant. Cette option est à déconseiller lorsqu’un des conjoints a déjà un ou des enfants d’un premier mariage. Car ce ou ces derniers peuvent s’estimer lésés et demander à faire valoir leur réserve héréditaire, en exerçant une action de réduction particulière appelée action de retranchement. Ils peuvent ainsi obtenir le retour à l’équivalent d’une donation au dernier vivant », ajoute Nathalie Couzigou-Suhas.

Pour des couples plus aisés, pensez aussi parallèlement à consentir à des donations à vos enfants, en vous réservant l’usufruit, réversible sur la tête du conjoint survivant en cas de décès. Cet acte est définitif mais a le mérite de transmettre un bien à son enfant tout en gardant la jouissance sa vie durant. Les droits de succession (ici, de donation) sont payés et il n’y a plus de taxes de transmission à payer sur ce bien par l’enfant au décès. Lorsqu’il y a plusieurs enfants, ne consentez pas des donations isolément mais privilégiez la donation-partage.

Pour aller plus loin

Consultez le site des Notaires de France. Vous y trouverez de nombreuses informations utiles et pourrez accéder à un annuaire des notaires de France.
Profitez d’une consultation téléphonique. Tous les jours de 9 h 30 à 13 h, « Notaires Infos », centre de renseignements téléphoniques des notaires de France, répond aux interrogations des particuliers sur des questions d’ordre juridique. Tél : 0 892 011 012 (service 0,40 euro/min. + prix appel)

Besoin de plus d'infos sur le contart assurance-vie ?

La Macif vous guide, notamment pour savoir comment rédiger la clause bénéficiaire de votre contrat.

L'Essentiel de l'article
  • N’hésitez pas à prendre rendez-vous avec un notaire pour faire le point sur votre situation et connaître les alternatives possibles.
  • Dans le cas d’une famille recomposée, anticiper le décès d’un des conjoints est vivement recommandé afin d’éviter les conflits familiaux.
  • Sachez que les testaments ou la « donation au dernier vivant » ne vous engagent pas à vie : ils peuvent être modifiés à tout moment.
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