Familles recomposées : quel statut pour les beaux-parents ?

Dans les deux tiers des familles recomposées, les enfants vivent avec l’un de leurs parents et son nouveau compagnon (1). Quelle peut être la place de ce dernier, en tant que beau-parent ? Les explications de Géraldine Lanoë, notaire.

Temps de lecture : 6 min

à propos du contributeur

Géraldine Lanoë

Notaire

Paris

1 Une absence de statut pour le beau-parent

Si la question de la place des beaux-parents revient régulièrement dans le débat public, le législateur est clair. Quelle que soit sa participation à la vie quotidienne de l’enfant, le beau-parent n’a pas le moindre droit ni aucun devoir envers l’enfant de son conjoint, et ce qu’il s’agisse des couples de sexes opposés ou des couples de même sexe (2). Pas davantage en tout cas qu’en aurait un ami ou un proche. « Faute d’existence juridique, il ne peut donc compter que sur une reconnaissance de fait », précise Géraldine Lanoë.

« Il existe néanmoins une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en 2014. Toujours en discussion au Sénat, celle-ci prévoit la création d'un mandat d'éducation quotidienne, relève la notaire. Ce mandat, mis en place avec l'accord des deux parents, permettrait au beau-parent vivant de manière stable avec l’un des parents, d’accomplir des actes usuels de la vie quotidienne de l’enfant comme signer officiellement un livret scolaire, participer à des réunions avec les professeurs ou emmener l'enfant chez le médecin, explique la notaire. Ce document certifierait les droits d’un tiers à s'occuper de l'enfant dans la vie courante. Le mandat pourrait être révoqué à tout moment par le parent et prendrait fin en cas de rupture de la vie commune ou de décès du parent. »

Le saviez-vous ?

11 % des enfants vivent dans une famille recomposée. Cette proportion a doublé en l’espace de 20 ans. Sur ces 1,5 million d’enfants, 940 000 d’entre eux habitent avec un parent et un beau-parent, le plus souvent avec leur mère et un beau-père (1).

2 La délégation volontaire d'autorité parentale

En attendant qu’un véritable statut du beau-parent voie le jour, des procédures judiciaires permettent de participer au même titre que les parents biologiques, aux démarches de la vie quotidienne de l’enfant.

Parmi elles, la délégation d’autorité parentale introduite par la loi du 4 mars 2002. Comme le prévoit l’article 377 du Code civil, les pères et mères, ensemble ou séparément, peuvent, lorsque les circonstances l'exigent, saisir le juge aux affaires familiales en vue de voir déléguer tout ou partie de l'exercice de leur autorité parentale à un tiers appelé « délégataire ». Celui-ci peut être un membre de la famille, un proche digne de confiance, un établissement agréé pour le recueil des enfants ou un service départemental de l'aide sociale à l'enfance.

« Contrairement à une adoption, il ne s’agit en aucun cas d’établir un lien de filiation, précise Géraldine Lanoë. C’est davantage une mesure de gestion des droits et intérêts de l’enfant et de préservation de ses bonnes qualités de vie. La délégation permet de suppléer un parent qui serait dans l’incapacité d’élever son enfant ou tout simplement absent. »

3 L'adoption simple ou plénière

Une autre possibilité est l’adoption. Celle-ci peut être simple ou plénière.

Dans le premier cas, l’adoption simple ne remplace par le lien de filiation originel. Elle permet à l’enfant de maintenir des liens avec sa famille tout en créant un nouveau lien juridique avec le beau-parent. « Autrement dit, il aura deux familles », précise Géraldine Lanoë.

L’adoption plénière, elle, est une procédure moins demandée, car beaucoup plus lourde et contraignante.

« À la différence de l’adoption simple, elle est irrévocable et rompt définitivement les liens légaux de l’enfant avec le parent biologique qui n’élève pas l’enfant. Sauf exception, l'adoption plénière ne peut concerner que des enfants de moins de 15 ans. »

Qu’elle soit plénière ou simple, dans les deux cas, le beau-parent doit déposer une requête auprès du greffe du tribunal de grande instance. Avec pour condition, sauf circonstance particulière et autorisation du tribunal, d’avoir une différence d’âge d’au moins 10 ans avec son beau-fils ou sa belle-fille.

« Si l’enfant est mineur, il faut obtenir l’accord des deux parents. Et s’il a plus de 13 ans, il devra consentir à l’adoption », souligne Géraldine Lanoë.

4 Le beau-parent a-t-il le droit d'entretenir des relations avec l'enfant en cas de séparation ?

Le beau-parent a pu partager le quotidien du fils ou de la fille de son conjoint dès son plus jeune âge, pour autant aucun texte ne prévoit spécifiquement la possibilité pour lui de continuer à entretenir des relations s’il se sépare. L’article 371-4 du Code civil ouvre néanmoins une perspective. Il prévoit que l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec un tiers, parent ou non.

En attendant, le beau-parent peut faire valoir ses droits, et le juge aux affaires familiales peut l’autoriser à exercer un droit de correspondance et de visite, et plus exceptionnellement, un droit d’hébergement. La condition est qu’il ait résidé de manière stable avec l’enfant et l’un de ses parents, ait pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et ait noué avec lui des liens affectifs durables, stipule le Code Civil.

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L'Essentiel de l'article
  • Le beau-parent n’a aucun droit légal ni devoirs envers les enfants de son conjoint.
  • Le juge des affaires familiales peut prévoir un partage de l’autorité parentale entre le parent biologique et le beau-parent.
  • Il est possible d’adopter l’enfant de son conjoint. L’adoption peut être simple ou plénière.

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